Ambassadeur sur la 5ème édition du Seine-Marathon 76, Guillaume Ruel s’est prêté au jeu de l’interview. Le moment pour en découvrir un peu plus sur l’athlète normand, recordman de France sur 100km et d’Europe sur 50km. Il nous a parlé de son expérience sur la dernière édition du marathon en nous donnant aussi ses précieux conseils pour ne pas exploser au bout du 10 ème km sur un semi ou un marathon.

Pourrais-tu m’expliquer ce qu’est le programme idéal pour le marathon, par rapport à ton expérience ?

GR : Ça dépend vraiment du temps que tu peux y accorder forcément ce ne sera pas le même type d’entraînement. Dans la globalité, l’entraînement doit être le plus régulier et plus progressif possible. Il ne faut pas commencer par faire des sorties longues de 30 kilomètres dès ta première semaine. Par exemple ça peut être commencer par un travail d’intensité la semaine et une sortie plus longue le week-end où tu vas essayer de mettre ton allure spécifique du marathon. C’est important une régularité sur tes jours d’entraînements et à côté tu peux ajuster en programmant des footings de récupération plus faciles. Tout ça en y allant progressivement.

Nous sommes à 2 mois du Seine-Marathon 76, tu peux déjà commencer à faire des sorties longues de 15 kilomètres le week-end en augmentant progressivement jusqu’à 30 kilomètres maximum. Sur les 4 premières semaines entre 15 et 20. Entre la 4 et la 8ème semaine tu montes à 20-25-30 et arriver début septembre, tu réduis pour être frais avant la course. Une des erreurs à ne pas faire c’est de vouloir trop en faire à l’entrainement pour vouloir se rassurer. La compétition doit être différenciée de l’entraînement. Les conditions ne sont pas les mêmes, l’atmosphère et l’environnement aussi, trop vouloir se prouver n’amène à rien. Généralement, le jour de la course on se surpasse donc pas d’inquiétude.

Et qu’est-ce que tu dirais à une personne qui court sa première longue course ?

GR : Déjà ne pas s’enflammer au début, forcément sur les premiers kilomètres on a un peu la fougue mais il faut vite savoir se réguler et ne pas être trop gourmand. Sur un semi, il faut vraiment éviter de tracer et de se retrouver mal au 8ème. Il vaut mieux être sur les allures prévues et accélérer au 15ème si c’est possible. Dans la gestion de course le surrégime est vite arrivé si on ne sait pas bien gérer.

Et parfois l’allure et la montre peuvent être de mauvais alliés. Il ne faut pas trop être focalisé sur sa montre, par exemple si tu vois que tu as fait un kilomètre moins rapide à cause d’une montée, tu sais que tu vas récupérer le temps perdu dans la descente.

Dans une première course il faut aussi se servir des coureurs autour de soi et du public pour te donner de la force, ça aide toujours. Il ne faut pas se dire que les autres participants sont des concurrents, ce sont des camarades de course, l’entraide est importante, il faut les voir comme des coéquipiers. On est tous dans le même bateau donc autant profiter de l’engouement populaire.

En tant qu’athlète tu te nourris beaucoup de la foule sur les courses ?

GR : Clairement, en plus quand tu es en tête de course tu es plus soutenu et tu passes dans des endroits sans public tu as toujours hâte d’en retrouver. C’est agréable puisqu’on a vraiment l’impression de partager avec le public.

Est-ce que tu aurais des conseils pour s’entraîner pendant des périodes de grosse chaleur en été ?  

GR : Pour la course en soit, ce n’est pas vraiment un problème puisque la course étant à 9 heures fin septembre il ne risque pas de faire trop chaud. Mais la préparation se fait forcément dans la période estivale. Donc ça ne sert à rien de partir t’entraîner à 14h et prendre chaud alors que l’objectif ne sera pas couru dans le chaud.

L’été il faut profiter des jours qui sont assez long pour courir tôt le matin ou en toute fin de journée. Ça ne sert à rien de se confronter à la chaleur surtout quand on est normand ! Il faut aussi bien se protéger avec une casquette, bien s’hydrater, privilégier les parcs avec de l’ombre. Pas trop faire attention à ses allures, plutôt écouter les sensations, forcer l’allure à ce moment ne donnera pas de bons résultats. Après il est aussi important pour récupérer tout ce qu’on a perdu donc hydratation et nutrition pour l’énergie.

Enfin sur la nutrition, l’équipement ou les ravitaillements, qu’est-ce que tu pourrais conseiller ?

GR : Déjà sur l’équipement, en septembre il ne faut jamais partir trop couvert même s’il fait froid le matin. De toute évidence, ne pas mettre de nouvelles chaussures le jour de la course, c’est le piège du matériel qui va aider alors que ce sont les jambes qui courent. L’important pour les chaussures reste le confort et l’habitude plutôt que de partir sur les plus performantes que portent les athlètes.

Il faut aussi penser à sa stratégie de ravitaillements par rapport à ce qui est proposé sur la course. C’est assez efficace de prendre les mêmes ravitos qui seront proposés le jour J pendant les sorties longues d’entraînement comme cela le corps est habitué. Il faut s’ajuster aussi par rapport à l’emplacement et au temps entre les deux.

Tu t’es davantage spécialisé dans les plus longues distances, quelle est ta relation avec la distance marathon ?

GR : D’abord j’ai fait mes classes sur des 10km et des semi. Finalement j’ai commencé les marathons assez tôt, à l’âge de 19 ans où j’ai fait les championnats de France de marathon où j’ai terminé 4ème toutes catégories confondues. A cette occasion j’avais même battu le record de France des moins de 23 ans. J’avais vraiment l’envie de me prouver que c’était une distance qui ne faisait pas peur donc 3 semaines avant j’allais courir un marathon à l’entraînement. Ce n’est pas un truc à conseiller !

Par rapport au Seine-Marathon 76 où tu as participé l’année dernière, quel est ton retour d’expérience ?

GR : Déjà le fait qu’il y ait des courses le samedi soir, ça fait vraiment un week-end de course, ce qui crée une vraie ambiance qui se prolonge le dimanche matin. Le fait de faire deux boucles dans le centre ville peut paraître ennuyant mais je trouve que c’est plus dynamique qu’un circuit complet où tu vois des gens au début et à la fin.

Pour nous les coureurs de tête, on rentre assez rapidement sur les coureurs du semi-marathon donc tu ne te sens pas trop seul en fin de course. Après en termes de difficulté c’est assez bien jaugé avec quelques cotes mais tu retournes vite vers les quais qui sont très sympa.

C’est aussi sympa pour les spectateurs puisque la boucle est assez serrée donc ils peuvent te voir au moins 2 fois par tour. C’est plutôt sympa et assez rare.

Et s’il y avait un accomplissement dont tu serais le plus fier ou quelque chose qui t’as vraiment marqué jusque-là ?

GR : Pour moi ce seraient les meilleures performances, mon record d’Europe du 50km en Afrique du Sud, au départ les conditions étaient terribles avec 35° et 85% d’humidité. On y allait un peu comme ça même pas pour le record et finalement je bats le record de 8 secondes. Il y aussi des moments où ça ne se passe pas comme prévu.

Par exemple, le championnat du monde où je fais 95 kilomètres en tête et je me fais reprendre à la fin. Dans mon malheur je bats quand même le record de France. Mais en même temps si j’avais gagné la course je ne sais pas si ça aurait été plus beau souvenir parce que ça aurait été trop parfait. Le fait de passer à des émotions contradictoires ça crée des souvenirs.

A la fin je finis 5 ème, tout le monde pense que je pleure parce que j’ai battu le record de France qui avait 20 ans mais moi j’étais juste déçu de ne pas avoir le record du monde et le titre mondial. Et je me suis fait rattraper par le fait qu’avec mes coéquipiers on fini vice-champion du monde par équipe donc je suis passé d’une émotion triste à super euphorique.

Mes meilleurs souvenirs ne sont pas sur des résultats bruts mais plutôt sur des émotions. Parfois quand la performance est prévue ça enlève les péripéties qui rendent l’expérience spéciale.

Qu’en est-il de tes prochains objectifs ?

GR : Là, je vais faire pas mal d’altitude juste avant le Seine-Marathon 76, après je vais enchaîner quelques autres marathons. Avec en objectif sur 100km en janvier 2024 à Tel Aviv pour à minima pour battre le record de France de 100km et peut être plus mais pas forcément une volonté de record du monde.

Pour finir si tu avais une raison de venir sur le Seine marathon quelle serait-elle ?

GR : Déjà pour la très bonne organisation de l’événement. Ça reste une course à taille humaine, une course familiale qui n’est pas une ambiance que l’on retrouve partout. En Normandie c’est un des seuls marathons avec Caen et ce n’est pas à la même période de l’année donc il n’y a pas de concurrence. Il y a aussi une certaine proximité avec Paris donc tu peux y venir facilement et profiter d’un week-end sportif en Normandie.

Pour découvrir la ville c’est vraiment une super idée avec un parcours sympa qui te montre tous les coins. Autre rareté c’est le public de connaisseur que l’on y retrouve. Et pour moi en tant que Normand j’étais bien soutenu. C’est une belle fête conviviale.